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Chères Patientes, Chers Patients,
A l'appel des syndicats des médecins et des internes, le cabinet médical sera en grève le lundi 28 et le mardi 29 avril prochain.
Nous empruntons le texte suivant à un pédiatre des urgences de Valenciennes (To be or not toubib) qui explique très bien cette grève et le problème du monde médical actuel afin de vous apporter des explications.
Nous souhaitons que vous puissiez pleinement comprendre notre inquiétude afin d'avoir votre soutien, indispensable !
Vos médecins de famille
La grève des médecins et des internes à partir du 28 avril 
Explications 
" Portée par Guillaume Garot, député socialiste, et soutenu par plusieurs partis, la loi sur la régulation de l'installation des médecins fait beaucoup couler d'encre en ce moment
À raison, puisque l'enjeu va bien plus loin que d'obliger le médecin, que l'on voit comme forcément égoïste et vénal, à s'installer dans une région considérée comme un « désert médical ».
Pour commencer, je voudrais dire à tous les non-médecins que je comprends parfaitement leur colère quand à la situation de l'accès aux soins en France. Vraiment parfaitement.
Et j'expliquerais dans ce thread pourquoi.
Je comprends aussi que la proposition de loi a l'air complètement logique quand on la regarde sur le papier.
En effet, on nous explique du matin au soir à la télé ou dans les journaux qu'il n'y a plus assez de médecins et, vous le voyez bien vous-même, avoir un médecin traitant devient une chose très compliqué aussi.
On ajoutera à cela l'idée savamment cultivée par les politiques qu'il existe des zones sur-dotées en médecins.
Cette idée n'a rien d'anodine en réalité, vous allez voir, elle est même centrale dans l'histoire.
On imagine facilement que pour la personne qui habite dans un petit village où l'on a tout fermé, de la Poste à l'école en passant par le cabinet médical du coin, que d'arriver dans une ville, même petite, avec tout ça dedans, ça laisse amer.
Sauf que la vérité n'est pas que ces zones sont sur-dotées, c'est qu'elles ont un taux de médecins autour de la moyenne, quasi-normal pour la population.
Normal, pas pléthorique.
À force d'avoir des politiques de santé désastreuses depuis 50 ans et le fameux Numerus Clausus, nous avons simplement oublié ce qu'est la normalité.
Ces zones de quasi-normalité dont je parle concerne environ 13 % de la France métropolitaine.
C'est peu, n'est-ce pas ?
Ce qui veut dire surtout que 87 % du reste de la France est considéré comme un désert médical.
Et le gouvernement, depuis des années, a tenté de relativisé la situation en mettant des « degrés » de désert.
Y'a les déserts déserts, les déserts moyens, les déserts un peu.
Tout est décalé. Tout a été détourné.
La preuve ultime ?
Allez, essayez de trouver une seule commune, je dis bien une seule, qui dit « Bof, on a trop de médecins, on en veut plus, tenez, prenez en un ou deux de chez nous pour votre commune ».
De ce fait, prenons ma propre région d'exercice, Valenciennes et ses environs, qui est considérée comme bien lotie avec un nombre suffisant de praticiens. Sisi, je vous assure
La réalité, c'est que mes urgences ne voient pas un jour, un seul jour, sans plein de personnes qui n'ont plus de médecin traitant. Qui ont des délais de dingue pour leurs soins.
De même, je suis médecin mais, surprise, j'ai une mère, avec pas mal de pathologies, qui habite Beuvrages juste à côté de Valenciennes.
Beuvrages, c'est considéré comme super bien selon les indicateurs officiels parce que le nombre de médecins est suffisant.
Et vous savez quoi ? Ma mère, il a fallu que j'en supplie un de médecin pour la prendre car ils sont tous surchargés de fou.
Donc, vous voyez, je comprends.
Je comprends parce que je suis aussi aidant dans cette histoire, je vois tous les jours ma mère (et mes patients qui passent aux urgences) dans une merde noire car il n'y a pas (du tout) assez de médecins.
Mais les politiques vous diront , eux, « ca va » !
Du coup, je précise aussi : je suis médecin des urgences pédiatriques depuis 6 ans maintenant.
Toutes ces histoires de régulation d'installation, ça ne va pas me toucher directement.
Pas du tout même.
J'exerce strictement en hôpital dans un bassin très pauvre désespérément en besoin comme je l'ai dit.
Pour moi, ça ira. Il n'y aura aucune obligation
Et c'est le cas de pas mal d'autres médecins qui se sont élevés contre cette loi d'ailleurs.
Des médecins déjà installés depuis longtemps, travaillant en hospitalier, pas concernés de par la spécialité…
Mais on tente désespérément de vous avertir en fait.
Dans les années 70/80, le gouvernement et les décideurs au sein du corps médical, ils ont voté un Numerus Clausus.
Ce qui a limité le nombre de médecins sans prendre en compte la démographie.
Ils se sont dit : « Moins de médecin, moins de soins (et plus de bénefs) »
Et sur le coup, vu le nombre de médecins, ça paraissait bien pour faire des économies.
Sur le papier, comme aujourd'hui, ça paraissait logique.
Nous sommes en 2025 et cette « logique » a entrainé la situation catastrophique que vous connaissez. Et nos politiques sont infoutus de trouvé une solution miracle qui n'existe pas et de vous dire que leurs erreurs sont irréparables à court terme.
Souvenez-vous en bien.
Vous savez c'que va faire la régulation des médecins ?
C'est très simple.
Quand un médecin va vouloir s'installer, il n'ira que dans des zones où on estiment qu'il s'agit d'un désert médical, d'un vrai, profond.
Sur le papier, ça paraît excellent, non ?
En fait…
Relisez ce que j'ai dit au début.
L'État ne considère pas que 87% de la France est un désert, ils ont gradé les déserts. Ils ont fait des niveaux de déserts tellement y'en a partout.
Donc, pour reprendre mon exemple, à Valenciennes et toutes les communes autour où des centaines de patients n'ont plus d'accès aux soins en ville : Fini !
En gros, on va interdire aux médecins de s'installer même là où il y en a aussi (fortement) besoin.
Et surtout, vu l'étendue du désert médical en France, et l'absence total de surnombre de médecins ou de réserve à disposition, il n'y aura pas assez de médecin pour tous.
C'est d'ailleurs déjà le cas aujourd'hui.
Quand vous pointez du doigt une commune où les gens ont un/des médecins, c'est qu'à force de voir le marasme autour, vous ne voyez plus que ce n'est pas l'abondance inacceptable mais l'approchant de la normalité (et encore…)
En gros, les politiques ont tellement inculquer aux gens de niveler par le bas, ils ont tellement pris l'habitude de vous faire envier le voisin qui a juste un truc un peu mieux, que vous ne voyiez plus que c'est la catastrophe quasi-partout.
Voilà la vérité.
Et je suis désolé de cette vérité.
Car JAMAIS aucun député ne va vous la dire.
Ni chez LFI, ni chez LR ni ailleurs, ni au PS, rien.
C'est que les politiques menées depuis 50 ans ont foutu en l'air votre médecine de ville (et hospitalière) et qu'il n'y a PAS de solution en fait.
Mais vous dire ça, c'est ultra-impopulaire.
Et un politique, ça veut être populaire, ça veut avoir un siège à l'AN.
Quitte à tordre la réalité et vous promettre une réponse-miracle qui n'arrivera jamais.
Pire, qui aggravera les choses.
On peut tenter des mesures pansements (il y en a, ça existe) en attendant l'augmentation massive des médecins (en augmentant le nombre recrutés mais il faut minimum 10 ans de formation, oubliez pas) mais je suis désolé, il n'y a pas de solution au marasme de notre système de santé.
Et dernière chose…
Si en ce moment on vote cette loi, si ça tape sur les médecins actuels qui tentent tant bien que mal d'écoper/sauver leurs patients à leur échelle, c'est pour détourner sur nous votre légitime colère.
Alors que ce sont les gouvernements et politiques de tous bords les coupables.
Vous pouvez croire ce que vous voulez après m'avoir lu mais je me devais de vous le dire.
Pour moi, personnellement, ça ne changera rien, ni à ma situation, ni à mon salaire.
Mais le médecin de ma mère part bientôt en retraite.
Après ?
… Je ne sais pas.
Et ce sera terrible, difficile.
Ma mère sera dans la merde, comme la mère, le père, le grand-père, l'oncle, la fille de plein d'autres gens
Comme pour plein de français actuellement.
Et je les vois tous les jours ces parents qui n'ont plus de médecins, plus de recours, plus rien.
Et moi, je suis impuissant.
Ce sont les puissants qui nous piègent.
Et ils continuent, là, maintenant.
Ils veulent que vous nous détestiez, quitte à caricaturer les médecins (et des médecins cons, vénaux ou autres, y'en a, y'a toujours des imbéciles dans une profession, mais vous savez très bien que c'est une minorité)
Nous sommes en vérité les seuls qui restons pour vous soigner. Nous tentons dans un système qui prend l'eau.
Nous sommes en première ligne.
Au cabinet.
Aux urgences.
Et nous vous disons, comme les maires de France d'ailleurs, que c'est une erreur grave cette loi.
Voilà pourquoi nous faisons grève à partir du 28 Avril, voilà pourquoi vous devez écrire aux députés de votre circonscription pour nous soutenir et faire en sorte qu'on ne s'enfonce pas encore dans la galère."